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La Théorie Polyvagale pour gérer la colère des enfants

 

« Si l’enfant peut vivre sa colère en sécurité, il va progressivement retrouver le chemin de la sécurité et son système nerveux autonome va se réajuster. »

 

Dans mon dernier article sur la Théorie Polyvagale (TPV), je vous ai partagé ce que cette théorie, créée par Stephen Porges, apportait de nouveau et en quoi il était intéressant de la connaître sur un plan personnel.

Mais la TPV est également un formidable outil à utiliser dans vos relations aux autres et en particulier avec les enfants.

Avez-vous déjà été désemparé·e face à un enfant en colère ?

Face à un petit en colère, n’avez-vous pas essayé de le calmer avec des phrases du type :

  • « Arrête de te mettre en colère, il n’y a pas de raison de te mettre en colère » ;
  • « Mais pourquoi tu te mets en colère ? » ;
  • « Tais-toi ! » ;
  • « Calme-toi ! ».

Mais ce que l’on fait ici, c’est s’adresser à son « cerveau qui pense » alors que la colère est une expression du système sympathique… Donc l’enfant en colère est dans un état dysrégulé du système nerveux autonome, un état sympathique de survie.

Cet état sympathique empêche l’enfant (tout comme l’adulte d’ailleurs) d’être dans un état régulé ventral de sécurité, seul état qui permet la connexion à l’autre par le système d’engagement social et le plein accès à ses capacités cognitives.

Lorsque la colère est là, l’accès à cet état de sécurité n’est pas possible… C’est pourquoi s’adresser à sa tête, à son cerveau pensant, ne fonctionnera pas.

Un état de colère (qui est un état sympathique) demande beaucoup d’énergie. La TPV nous apprend que dans un tel état, le seul objectif de notre système nerveux autonome c’est d’éloigner le danger. La colère est comme une énergie qui tente de repousser le danger, et c’est la perception, consciente ou inconsciente, d’un danger qui a provoqué la colère.

 

Retrouver un état vagal ventral grâce à la TPV

Alors, que faire dans un premier temps ? Tout d’abord, évitons d’interpréter cette colère comme un caprice. La colère de l’enfant exprime un mal-être, une insécurité : il voudrait, ou plutôt son système nerveux voudrait, retrouver le chemin de la sécurité, mais il ne sait pas comment s’y prendre.

L’objectif est donc de le ramener à la sécurité autrement. Mais avant de s’occuper de l’enfant, il est d’abord essentiel de regarder ce qu’il se passe en nous.

Face à un enfant en colère, nous pouvons nous-mêmes nous sentir en insécurité. Par exemple, parce qu’on ne supporte pas les cris ou qu’on se sent impuissant ou qu’on n’a pas le temps… Résultat : on se retrouve également dans un état dysrégulé, loin du ventral, loin d’être cet être humain, ce parent, cet adulte sécure dont l’enfant a besoin.

Si l’enfant en colère active quelque chose chez nous qui nous met dans l’insécurité, il est nécessaire de s’occuper en premier lieu de son propre état autonome. Comme dans l’avion, lorsque l’on doit mettre les masques à oxygène en cas de dépressurisation de la cabine : on met d’abord son masque avant de mettre le masque à l’enfant à côté de nous.

La Théorie Polyvagale nous dit la même chose ! Retrouvons d’abord un état vagal ventral.

Parce que tant que nous nous sentons en insécurité, nous n’envoyons pas à l’enfant les signaux de sécurité dont il a besoin. Nous sommes plutôt dans un dialogue Sympathique / Sympathique (on s’énerve, on crie plus fort, on l’envoie dans sa chambre, on sort de la pièce…) ou un dialogue Sympathique / Dorsal (on se bouche les oreilles, on s’immobilise, on se sent impuissant, on pleure…).

Retrouvons donc d’abord le chemin de la sécurité pour nous-mêmes.

 

Comment calmer un enfant en colère ?

 

Il est important de trouver un ton de voix que l’enfant va pouvoir entendre et qui amène un sentiment de sécurité. Notre nerf vague ventral est connecté au nerf crânien XI qui régule la prosodie de la voix, c’est-à-dire la musicalité, le ton, la hauteur des sons, etc., de notre voix. On va donc aller chercher ce ton de voix secure, afin d’envoyer des signaux de sécurité à l’enfant. Et évidemment on va éviter de crier.

Ensuite, accueillir l’émotion est essentiel. Par exemple, on peut lui dire : « D’accord, je vois que tu es en colère » ou « Même si je ne sais pas ce qui t’a mis en colère tu as certainement plein de raisons d’être en colère ». L’idée ici est de l’aider à mettre des mots sur ce qu’il ressent et qu’il entende qu’il est vu, compris et non jugé.

Enfin, on peut lui faire une proposition : « Je me mets à côté de toi, j’ouvre mes bras, tu en fais ce que tu veux. Moi, je suis là. Si tu as besoin, je suis là. Si tu as besoin de sortir, courir, crier ta colère dehors, tu peux sortir, courir, crier ta colère dehors. Moi, je suis là et j’assure ta sécurité ». Vous lui offrez la possibilité de vivre son insécurité dans la sécurité de votre Ventral.

Certains enfants peuvent aussi avoir besoin d’être serrés très forts, de sentir un adulte secure qui les contient : « Je te serre dans mes bras et tu peux vivre ta colère, en sécurité ». L’objectif c’est vraiment d’amener cette sécurité du vagal ventral.

Rappelons ici que « ventral » ne fait pas référence au « ventre » mais à l’anatomie du système nerveux. Le nerf vague ventral ce sont les fibres nerveuses du nerf vague qui ont pour origine le noyau ambigu, lequel se situe en avant du noyau dorsal du vague, origine des fibres nerveuses du nerf vague dorsal.

Si l’enfant peut vivre sa colère en sécurité, il va progressivement retrouver le chemin de la sécurité. Ce qui permet à son système nerveux autonome de se réguler : « Je peux être en colère, j’ai le droit d’être en colère. Si ma colère est entendue et peut s’exprimer, alors je vais retrouver ma sécurité et je ne serai plus bloqué dans cette colère ».

Car il ne faut pas oublier une chose : le danger des colères qui s’expriment mais qui ne sont ni entendues, ni régulées, c’est qu’elles vont se répéter.

Nous avons tous été confrontés à une situation similaire, que ce soit en tant que parent, oncle ou tante, grand-parent… ou même témoin dans la rue ou dans un magasin. Nous avons tous déjà été confrontés à des enfants en colère.

La TPV nous donne ici des pistes pour y répondre de manière plus juste, pour nous, en tant qu’adulte, comme pour l’enfant.

Dans le prochain article, nous parlerons de devenir un thérapeute polyvagal-informé.

Série d’articles « La Théorie Polyvagale au quotidien » par Florence Bernard.

Pour aller plus loin :